[Info FR] Deux ans après la signature de l’accord de paix entre le gouvernement colombien et les forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC)

La Vía Campesina via-info-fr at viacampesina.org
Mar 27 Nov 17:36:01 CET 2018


DEUX ANS APRÈS LA SIGNATURE DE L'ACCORD DE PAIX ENTRE LE GOUVERNEMENT
COLOMBIEN ET LES FORCES ARMÉES RÉVOLUTIONNAIRES DE COLOMBIE (FARC)

COMMUNIQUÉ DE LA VIA CAMPESINA

(Harare, 24 novembre 2018) Comme vous le savez, le gouvernement du
président Juan Manuel Santos, au nom de l'État colombien, et les Forces
Armées Révolutionnaires de Colombie- FARC (étant à présent un parti
politique légal) ont signé un accord de paix le 24 novembre 2016 pour
faire cesser un conflit armée qui a ravagé le peuple colombien pendant
plus de 50 ans. Ce conflit a eu de profondes conséquences économiques,
sociales et politiques et a créé une douloureuse rupture du tissu
social, de la vie commune et de l'unité des familles et de la société
colombienne.
La Vía Campesina, organisation qui regroupe environ 200 millions de
paysans et de paysannes du monde entier et qui participe comme l'une des
organisations garantes du processus de paix à la demande des parties
concernées, voit avec une profonde préoccupation comment, après deux ans
de la signature de l'Accord final pour la fin du conflit et la
construction d'une paix stable et durable, les points fondamentaux de
cet accord ont subi des modifications dans leurs parties essentielles
d'après les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire de l'État
colombien.
C'est ainsi, par exemple, que LE POINT 1, intitulé Réforme Rurale
Intégrale (RRI): vers une nouvelle campagne colombienne qui envisage la
réalisation d'un cadastre rural pendant les dix prochaines années pour
élucider l'origine de la propriété des terres n'a pas avancé... La
création d'un fond de terres de trois millions d'hectares pour les
paysan.ne.s sans terre ou ayant des terres insuffisantes, la
formalisation massive de la propriété rurale sur 7 millions d'hectares à
travers la clarification de titres et d'actes, pour un total de 10
millions d'hectares : Rien de cela n'a vu le jour.
C'est aussi le cas du POINT 4 qui concerne la solution au problème des
drogues illicites, un autre point essentiel pour la campagne colombienne
et pour les communautés rurales. Pourtant ces communautés envisagent des
compromis tels que les plans intégraux, l'éradication volontaire, la
participation des gouvernements locaux et départementaux, ainsi que le
financement de projets et de programmes de remplacement de la part de
l'État si ces projets comptent avec la participation et l'accord des
communautés.
Cet Accord n'a pas été respecté et il a été remplacé par la
criminalisation, la judiciarisation et la pénalisation qu'imposaient
déjà le gouvernement antérieur à celui du président Juan Manuel Santos,
et qui sont aggravées actuellement par les mesures du nouveau président
Iván Duque. Ce dernier a décidé d'imposer l'éradication forcée et la
fumigation aérienne du glyphosate ayant pour effet des conséquences
graves pour la santé humaine, la faune et la flore. Il donne aussi une
réponse militaire, pénale et judiciaire à un problème qui est
essentiellement social et économique.
Des aspects fondamentaux comme la JUSTICE SPÉCIALE POUR LA PAIX (JEP)
ont été modifiés par les différentes branches du pouvoir dans des
aspects essentiels. Par exemple, l'obligation de déclaration préalables
a été supprimée et cela prive la société de connaître la participation
réelle des multinationales, des banques, des latifundia d'élevage, de
l'agro-industrie, des fonctionnaires et personnel civil appartenants à
l'État colombien dans l'organisation, le financement et le soutien à des
groupes paramilitaires et autres structures et organisations qui ont
participé à ce long conflit armé.
Comme si cela ne suffisait pas, la création de 14 nouveaux magistrats
assumant la fonction d'interroger et de juger les militaires a provoqué
une nouvelle mutilation aux organes vitaux de la JEP. Cette nouvelle
fonction couvrira sans doute avec le voile de l'impunité et de
l'immunité les crimes militaires. Par ailleurs, elle viole aussi le
droit aux victimes à la vérité, la justice, la réparation et
non-répétition, le droit de savoir ce qui s'est passé avec les membres
de leurs familles qui ont été torturés, assassinés ou disparus, les noms
et la responsabilité des exécuteurs intellectuels et matériels. Tout
cela empêche sérieusement le travail de la JEP, de la Comisión de la
Verdad (en français, Commission de la vérité) et de la Comisión de
Búsqueda de los Desaparecidos (en français, Commission pour la recherche
des disparus). Tout ceci est encore plus grave si l'on considère que les
victimes ont été le point focal de l'attention dans l'Accord de paix.
Mais les victimes ont aussi constaté le viol de leurs droits dans
l'Accord où il était aussi prévu l'accès à 16 sièges du Parlement
colombien, ce droit leur a été aussi nié. La réforme politique envisagée
dans la signature de cet Accord fait partie également des points non
tenus par le gouvernement et l'État colombien.
En ce qui concerne la RÉINTÉGRATION DES EX-COMBATTANTS DES FARC,
L'Accord de paix prévoit un financement de 12 millions de pesos par
ex-combattant pour des projets productifs, ainsi que la garantie de
construction et réparation des voies de transport et d'autres services
essentiels, tels que le logement, la santé, la formation et l'éducation.
L'État colombien ne respecte pas non plus cette obligation.
Ce qui est le plus grave et révoltant, c'est qu'une fois signé l'Accord,
une vague criminelle d'extermination contre les ex-combattants des FARC
et leurs familles s'est déclenchée, ainsi que contre les dirigeants et
activistes de gauche, les défenseur.e.s des droits humains, les
activistes environnementaux, les paysan.ne.s, indigènes et descendants
d'Africains. Ceci n'est pas sans nous rappeler la période sombre
d'extermination de l'Union Patriotique, et pourtant l'État n'a pris
aucun engagement pour combattre, démanteler et faire subir un procès
judiciaire aux groupes paramilitaires. La Fuerza Alternativa
Revolucionaria del Común (en français, force alternative révolutionnaire
du commun) a récemment dénoncé le fait qu'une étape supplémentaire avait
été franchie dans la volonté d'extermination de ses dirigeants,
activistes et membres suite à l'annonce d'un nouveau plan de
criminalisation annoncé par les porte-parole de la police colombienne.
À plusieurs reprises, le Centre démocratique et le président colombien
Ivan Duque ont exprimé publiquement, dans certains cas, leur désir de
réduire en miettes l'Accord de paix, dans d'autres cas, leur volonté de
le revoir et réformer profondément.
Nous avons témoigné - aussi bien dans notre première (2016) comme dans
notre deuxième (2017) Mission internationale de solidarité avec la
Colombie - des défis pour la paix dans ce pays, la vision des
paysan.ne.s dans leurs territoires et le besoin de justice
environnementale pour la justice sociale. Engagés pour la paix et
fidèles à notre rôle de garants de cette dernière, nous allons organiser
la troisième Mission internationale de solidarité en 2019, animés du
désir profond de retrouver le peuple et le gouvernement dans une voie de
paix stable et durable.
Face à tous ces constats, La Via Campesina appelle le peuple colombien,
ainsi que toutes les organisations dans le monde, la communauté
internationale, les Nations unies, la FAO, l'OIT, l'Union Européenne, le
mouvement des non-alignés, les gouvernements, les organisations, les
personnalités influentes, à élever leurs voix et exiger le respect
rigoureux de l'Accord final pour la cessation du conflit et la
construction d'une paix stable et durable sans réforme ni retard. 

CONTACTS POUR LA PRESSE
Nury Martinez | +57 310 772 0098 | nury254 at gmail.com 

Federico Pacheco | +34 690 651 046 | pachecofederico at yahoo.es 

Véronique Leon | +33 622 161 399 | verobique at gmail.com
-------------- section suivante --------------
Une pièce jointe HTML a été nettoyée...
URL: <http://mail.viacampesina.org/pipermail/via-info-fr/attachments/20181127/8ac589ef/attachment.html>


Plus d'informations sur la liste de diffusion Via-info-fr