[Info FR] La Via Campesina appelle à la mobilisation contre l’OMC et les accords de libre-échange

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Mar 3 Sep 18:39:35 CEST 2019


 

LA VIA CAMPESINA APPELLE À LA MOBILISATION CONTRE L'OMC ET LES ACCORDS
DE LIBRE-ÉCHANGE

Appel lancé le 2 septembre 2019 [1] 

Deux décennies après sa création, l'Organisation mondiale du commerce
(OMC) - l'un des porte-drapeaux de la mondialisation et du
néolibéralisme - est confrontée à une crise existentielle provoquée par
le même groupe de personnes qui l'a créée. Cela se produit également à
un moment où les paysan·ne·s et les populations autochtones sont dans
une situation bien pire qu'il y a vingt ans : leurs terres, leurs
rivières, leurs océans et leurs forêts ont subi une érosion massive et
des expulsions forcées leur sont infligées par des entreprises avides de
profits. Les marchés paysans locaux et les systèmes alimentaires de
plusieurs pays ont été décimés par un ordre du commerce international
qui ne tient compte que de la marchandisation de tout, y compris des
aliments que les gens consomment. 

Alors que cette organisation a inscrit dans ses objectifs fondateurs
"d'aider les pays en développement à tirer pleinement parti du système
commercial mondial", l'OMC est responsable des problèmes du monde en
développement aujourd'hui : la montée du chômage rural, la faim
croissante, les inégalités énormes qui existent entre pays et au sein
des pays, l'augmentation de la dette mondiale par habitant.

La Via Campesina avertit le monde depuis longtemps sur les risques de
dérégulation et d'expansion débridée du capital mondial. En tant que
personnes travaillant sur le terrain pour nourrir 70% de la population
mondiale, nous avons été les premiers à faire les frais des accords de
libre-échange qui ont été mis de l'avant par l'OMC et d'autres
institutions multilatérales. L'OMC a pris la tête du peloton en
séduisant et en contraignant nos gouvernements à adhérer aux grands
projets de quelques pays riches. La dévastation causée par ce modèle
descendant de la gouvernance mondiale a d'abord été ressentie sur nos
territoires lorsqu'il a fait chuter les prix de nos produits, détruit
les marchés paysans locaux, effacé la riche biodiversité qui existait
dans nos champs, enlevé notre autonomie sur les semences et chassé des
millions de nos frères et soeurs de leurs territoires. 

C'est cette destruction des pays qui a forcé l'un des nôtres, Lee Kyung
Hae de Corée du Sud, à se tuer devant le lieu de la réunion
ministérielle de l'OMC à Cancun, Mexique, en 2003. Le 10 septembre de la
même année, lorsqu'il a commis cet acte tragique, il avait autour du cou
une banderole sur laquelle on pouvait lire "L'OMC tue les agriculteurs".
Autrefois cultivateur de riz autosuffisant en Corée rurale, Lee avait
tout perdu à cause du dumping bon marché du riz et de la viande
importés, résultat d'accords de libre-échange imposés par l'OMC. Il a
pris une mesure si extrême parce que les riches et les quelques
personnes qui dirigeaient ces institutions ou qui en profitaient étaient
trop éloignées des réalités vécues dans les campagnes. Son acte de
sacrifice a amené le compte rendu déprimant du monde rural juste devant
leurs portes, même si, dans ses derniers instants, il a courageusement
fait écho aux demandes des paysans et des communautés rurales du monde
entier : "garder l'agriculture hors des négociations de libre-échange de
l'OMC". 

Depuis lors, La Via Campesina célèbre chaque année le 10 septembre comme
Journée internationale de lutte contre l'OMC et les accords de
libre-échange, afin de perpétuer le souvenir de Lee Kyung Hae et de ne
pas rester muet devant les conséquences désastreuses du libre-échange
international. 

16 ANS APRÈS CE TRAGIQUE INCIDENT, QU'EST-CE QUI A CHANGÉ ? 

Rien, si ce n'est que ceux qui financent l'OMC refusent maintenant de
continuer à le faire. C'est ironique quand les riches capitaines du
capitalisme prétendent qu'ils ont obtenu de mauvais accords de l'OMC. Il
y a donc lieu de se demander qui a obtenu la bonne affaire. Mais ne nous
laissons pas berner par cette mascarade de fausses menaces faites par
les pays occidentaux riches de se retirer de l'OMC. Au cours de la
dernière décennie, nous avons assisté à la mise en place d'accords de
méga libre-échange bilatéraux et régionaux ou en créant de nouveaux
blocs commerciaux unifiés. 

Ainsi, alors que l'OMC finira par être affaiblie ou morte, le
capitalisme veut continuer à prospérer par d'autres moyens. Il porte des
noms différents selon les continents. 

Le Partenariat économique régional global (RCEP) comprenant les pays de
l'ANASE, l'Inde, l'Australie et la Nouvelle-Zélande est l'un de ces
accords commerciaux du nouvel âge qui veulent créer un marché unifié
dans la région, négocié " en dehors de l'OMC ". Les organisations
paysannes de cette région ont souligné l'impact que cela pourrait avoir
sur leurs moyens d'existence, en particulier sur ceux des petits
producteurs laitiers, ainsi que les lois restrictives sur les semences
et plus encore. Pourtant, ces négociations se poursuivent à huis clos de
la manière la plus opaque possible, menées par quelques uns qui n'ont
jamais tenu une charrue dans leurs mains ! 

L'accord UE-Mercosur entre l'Europe et le bloc économique et politique
composé de l'Argentine, du Brésil, du Paraguay, de l'Uruguay et du
Venezuela, en négociation depuis 17 ans et finalement signé par la
Commission européenne en juillet dernier, en est un autre exemple. La
Coordination européenne de la Via Campesina (ECVC) avait averti que
l'accord avec le Mercosur menace de saper les normes en matière de
santé, d'environnement et de bien-être des animaux dans l'Union
européenne, en plus de manquer de cohérence politique avec les grandes
promesses faites à la COP 23. Les organisations paysannes du bloc
Mercosur l'appellent un modèle néocolonial qui aboutira à une
concentration du capital pour quelques-uns et à la pauvreté pour la
majorité. 

En Afrique, la création de l'Accord de libre-échange continental
africain, un méga-accord régional de libre-échange, est " fondée sur
l'idée que la libéralisation du commerce, par la réduction des barrières
tarifaires et non tarifaires, augmentera considérablement le commerce
intracontinental et que cet accroissement sera bénéfique pour tous ".
CADTM, 20191 [2]. Rien ne peut être plus éloigné de la vérité. 

Les organisations paysannes du Canada ont également dénoncé l'Accord
Canada-États-Unis-Mexique (USMCA, connu auparavant sous le nom d'ALENA)
pour ne pas avoir tenu compte des préoccupations des producteurs de
céréales et des producteurs laitiers du pays. 

L'Accord global et progressif de partenariat transpacifique (CPTPP)
entre l'Australie, le Brunei, le Canada, le Chili, le Japon, la
Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour et le
Vietnam a semé la peur de la capture des systèmes de semences par les
entreprises, la dilution de la réglementation des OGM et de graves
inquiétudes chez les petits producteurs alimentaires. 

Bon nombre, sinon la totalité, de ces accords commerciaux comportent la
disposition controversée du règlement des différends entre investisseurs
et États, qui, dans tous les cas, permet invariablement aux entreprises
privées de passer outre aux lois nationales souveraines et de poursuivre
les gouvernements nationaux pour menace à leur rentabilité. Un système
qui permet aux sociétés privées multinationales de traduire une nation
souveraine devant un tribunal international opaque, car le " crime " de
choisir le bien-être des gens plutôt que le profit est à leurs yeux
dangereux et doit être farouchement combattu. 

REJETER L'OMC ET LES ALE, MOBILISER POUR UNE ALTERNATIVE MENÉE PAR LES
PAYSAN·NE·S !

C'est dans cet esprit que La Via Campesina appelle ses membres et alliés
à ne pas se laisser abuser par l'écran de fumée d'une " OMC en voie
d'affaiblissement " et à prendre conscience du nouvel âge, et que les
accords bilatéraux de libre-échange sont aussi voire plus nocifs. 

Alors que nous nous souvenons de Lee Kyung Hae en septembre de cette
année, agissons, éduquons et organisons aussi les membres ruraux de
notre mouvement et nos alliés au sujet des dangers qui guettent ces
négociations commerciales faites à huis clos. Il est important que nous
rejetions toutes sortes d'accords de libre-échange et que nous œuvrions
au démantèlement complet de l'OMC alors qu'elle se prépare à se réunir
pour la prochaine réunion ministérielle au Kazakhstan. 

Il est important d'informer la population des alternatives paysannes qui
existent, qui peuvent nourrir la population et aussi sauver la planète.
La Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et autres
personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP), que notre
mouvement a remportée après 17 ans de négociations acharnées, est un
instrument de protection des droits de nos peuples et nos efforts
doivent être consacrés à la faire appliquer dans nos pays. 

Il est vital pour nos mouvements de promouvoir et de renforcer les
marchés paysans locaux en vendant des aliments produits localement selon
des méthodes agroécologiques aux clients locaux, dans le respect de la
diversité des systèmes alimentaires locaux. Nous exigeons des politiques
nationales qui renforcent ces systèmes de marché paysans et qui
rejettent les accords de libre-échange qui constituent une menace
existentielle pour eux. 

Il est important que nos mouvements sur le terrain soutiennent également
la Campagne mondiale pour un traité des Nations Unies sur les droits de
l'homme qui vise à mettre fin à l'impunité des sociétés transnationales
et à supprimer les dispositions controversées du mécanisme de règlement
des différends entre investisseurs et États, et de tous les accords de
libre échange. 

A partir du 10 septembre, nous exhortons les 182 organisations paysannes
de La Via Campesina dans 81 pays, l'ensemble de nos mouvements sociaux
alliés, les institutions académiques, les écoles politiques de formation
et les ONG à organiser des actions directes, des événements publics, des
sessions d'étude et des manifestations pour exposer les dangers de ces
accords de libre-échange dans leurs régions et leurs pays et aussi pour
présenter une alternative enracinée dans les cultures locales, leur
contexte et leur biodiversité.

> Que l'appel de ralliement pour nos actions mondiales soit une fois de plus : 
> 
> "L'OMC ET LES ACCORDS DE LIBRE ÉCHANGE HORS DE L'AGRICULTURE !" 
> 
> "LES SYSTÈMES DE COMMERCE PAYSAN AU LIEU DU LIBRE-ÉCHANGE" 
> 
> "LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE, PAS LE LIBRE-ÉCHANGE !"

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officielles de la journée d'action qui seront lancées pendant la
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1 [7]
http://www.cadtm.org/The-African-Continental-Free-Trade-Agreement-Loss-of-Sovereignty-Lack-of
[8] 

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[1]
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