[Info FR] 16 octobre : “La souveraineté alimentaire est la lumière qui nous montre la fin du tunnel”

La Vía Campesina via-info-fr at viacampesina.org
Ven 16 Oct 16:13:52 CEST 2020


 

"LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE EST LA LUMIÈRE QUI NOUS MONTRE LA FIN DU
TUNNEL" INSISTE LA VIA CAMPESINA AU MOMENT DE CÉLÉBRER LE #16OCTOBRE
DANS UNE ANNÉE MARQUÉE PAR UNE PANDÉMIE MONDIALE

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COMMUNIQUÉ DE PRESSE : (HARARE, 16 OCTOBRE 2020), JOURNÉE D'ACTION
INTERNATIONALE POUR LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE DES PEUPLES ET CONTRE
LES MULTINATIONALES 
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Trente-cinq millions de cas confirmés - environ un million de morts-
dans les huit derniers mois. La COVID 19 est une crise d'une grande
ampleur pour l'humanité. 

Des rapports successifs ont fait état de l'impact dévastateur que cette
pandémie a eu sur les vies des personnes partout dans le monde. Aucun
pays et aucune communauté ne sont actuellement immunisés face au virus.
Pour les gens les plus pauvres et les plus marginalisés, la réalité
quotidienne est celle d'un dilemme à nul autre pareil : mourir à cause
de la COVID ou mourir de faim. 

Cruellement et ironiquement, ce même monde qui gaspille ou perd 1.3
milliards de tonnes de denrées alimentaires chaque année, est un monde
où encore quasiment un milliard de personnes souffrent de la faim. La
l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture
(FAO) estime que la quantité d'aliments perdus chaque année serait
suffisante pour alimenter deux milliards de personnes. Mais, force est
de constater que le complexe agroindustriel qui contrôle la majeur
partie de l'approvisionnement mondial reste empêtré dans ce paradoxe et
ne résous aucunement le problème de la faim. Par ailleurs, selon la FAO
(SOFI 2020 [1]), la pandémie de la COVID-19 pourrait ajouter entre 83 et
132 millions de personnes au nombre total de personnes sous-alimentées
dans le monde en 2020. 

Rien qu'en Asie, près de 160 millions de personnes pourraient passer en
dessous du seuil de pauvreté. En Amérique latine, ce chiffre est
d'environ 45 millions de personnes. Cette pandémie porte donc clairement
atteinte aux efforts internationaux visant à réduire la pauvreté dans le
monde. L'UNICEF, le Fond des Nations unies pour l'enfance, a calculé que
872 millions d'étudiants dans 51 pays sont privés de l'accès à leurs
cours. Comme évoqué dans la presse [2], plus de la moitié de ce nombre
habitent dans des zones où l'éducation à distance est impossible - ce
qui donne une idée de l'ampleur que pourrait avoir la crise
éducationnelle pour cette génération. 

Dans tout ce contexte pessimiste, pour quelques personnes c'est comme si
la pandémie n'existait pas. Un rapport de la banque Suisse UBS constate
que les milliardaires ont augmenté leur richesse de plus d'un quart
entre le pic de la crise en avril et le mois de juin. Notamment, ce sont
qui sont présents dans le secteur de la santé qui ont augmenté leur
richesse de plus de 50 %.

> QUE FAIRE DANS UN MONDE DANS CET ÉTAT? OÙ EST LA JUSTICE DANS TOUT CELA? C'EST DANS CE CONTEXTE QUE LA VIA CAMPESINA CÉLÈBRE AUJOURD'HUI LA JOURNÉE INTERNATIONALE D'ACTION POUR LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE DES PEUPLES

La Via Campesina, mouvement paysan mondial qui représente des millions
de paysan⋅ne⋅s, pêcheurs, migrants et producteurs d'aliments à petite
échelle dans plus de 80 pays a - à de nombreuses reprises - appelé les
gouvernements du monde à reconnaître les limitations et les injustices
inhérentes du système industriel alimentaire. 

Dans les cinq dernières décennies, l'expansion agressive de la
production industrielle d'aliments a affecté de plus en plus la santé
humaine. La sur-utilisation de produits chimiques et le sur-traitement
des aliments sont inhérents à ce système alimentaire industriel. Ces
pratiques rendent les aliments moins nutritifs et plus nocifs. Par
ailleurs, l'augmentation significative les zoonoses - maladies causées
par des pathogènes qui se transmettent des animaux à l'être humain
(comme la COVID-19) sont aussi des dérives de ces modes de productions
industrielles. Aux premiers signes d'une pandémie mondiale, ce complexe
alimentaire industriel a révélé en plein jour ses défaillances et laissé
les pays et les citoyens submergés dans le chaos. 

Pendant des décennies, les gouvernements n'ont pas fait grande chose
pour protéger les petits paysans et producteurs d'aliments qui ont été
expulsés de leurs terres par le développement de maxi fermes en
monocultures de plus en plus dysfonctionnelles. Ils sont restés inactifs
alors que leur dépendance vis-à-vis de quelques grands fournisseurs
d'aliments augmentait sensiblement. Ils n'ont rien fait alors que les
prix du marché mondial forçait les producteurs locaux à vendre leurs
produits à des prix injustement bas, permettant aux dirigeants des
multinationales de l'alimentation de continuer à augmenter leurs marges
de profit. 

Encore aujourd'hui, en pleine pandémie, nous constatons les démarches
insistantes du lobby de l'agroalimentaire pour s'emparer de tous les
espaces démocratiques de gouvernance. Par exemple, le partenariat entre
le Forum économique mondial (FEM) et le Secrétaire général des Nations
unies pour organiser un "Sommet des systèmes alimentaires" en 2021
reflète ouvertement une prise de contrôle au plus haut niveau des
Nations unies par ces entreprises. Cette pandémie nous a donné
suffisamment de raisons pour résister à cette mainmise des entreprises
et pour légitimer nos revendications en faveur d'un traité contraignant
[3] qui puisse tenir les entreprises responsables des violations des
droits de l'homme et des droits des paysan⋅ne⋅s. 

LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRES PAR L'AGRICULTURE PAYSANNE ET
L'AGROÉCOLOGIE.

Les représentant⋅e.s élu.e.s par les peuples doivent élaborer des
politiques publiques dans leurs pays afin de promouvoir la production
locale et la distribution d'aliments variés. Il est essentiel que chaque
gouvernement favorise la prise en main par les citoyens eux-mêmes de la
conception des systèmes alimentaires qui leur conviennent. Lorsque les
petits producteurs d'aliments auront le pouvoir de concevoir, de décider
et de maintenir des systèmes de production s'appuyant sur des méthodes
agroécologiques issues de siècles de connaissances et d'expériences
paysannes, nous aurons un système alimentaire plus divers,
culturellement et climatiquement adapté. Un rapport récent du programme
des Nations unies pour le développement (UNDP [4]) conseille une
transition agroécologique pour faire face à la crise mondiale de
l'alimentation et à la dégradation des sols. 

LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE ET L'ACCÈS À LA TERRE PAR LA RÉFORME AGRAIRE

La Souveraineté alimentaire garantit le plus élémentaire des besoins de
nos sociétés en tout temps : l'alimentation. 

Une pandémie mondiale ou n'importe quel événement qui puisse impacter le
monde peut être surmonté si l'alimentation est garantie pour tous. Notre
système alimentaire doit être conçu dans la pleine connaissance de nos
droits et de nos besoins essentiels. Manger des aliments sains est un
droit de chaque être humain sur cette planète. L'alimentation ne peut
pas être remplacée par des aliments sans goût, sans valeur nutritive,
homogénéisés et congelés comme peuvent l'être les produits laitiers et
carnés produits dans des fermes-usines lointaines. 

Pour que la souveraineté alimentaire soit garantie, tous les pays
doivent adopter des lois agraires qui protègent les terres cultivables,
les rivières, les océans et les bois des industries extractivistes et
immobilières. En effet, comment les gens peuvent-ils produire des
aliments si on leur prend la terre? Comment un pays peut-il se
considérer comme libre s'il ne peut pas alimenter ses propres citoyens
avec des produits sains et nutritifs? 

Pourtant, ce que nous constatons, même au cœur de cette pandémie, c'est
que les États et les lobbies de l'agroalimentaire continuent d'expulser
violemment les gens de leurs territoires [5], criminalisent les leaders
paysans [6] et continuent d'autoriser les accaparements des terres. [7] 

LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE PEUT REVITALISER LE MONDE RURAL

La pandémie a aussi exposé les souffrances que subissent tous les jours
des travailleurs migrants [8], hommes et femmes, qui vivent dans des
conditions dangereuses en terres étrangères où le contexte leur est
hostile, xénophobe et patriarcal. Il a fallu un pandémie pour rendre la
vie des milliards de travailleurs ruraux et urbains visibles aux yeux
des puissantes élites du monde, qui n'ont pas tardé à sympathiser sur
les réseaux sociaux, tout en continuant à rendre la législation du
travail plus "favorable aux entreprises". Cette hypocrisie criminelle de
la part des élites mondiales doit s'arrêter. Les travailleurs doivent
avoir le droit de trouver un emploi à proximité ou dans leurs pays
d'origine. La souveraineté alimentaire garantit que les systèmes
productions utilisent au maximum les ressources locales - tant humaines
que matérielles - dans la production, la distribution et la consommation
des aliments. Pourquoi un travailleur migrerait-il vers une ville et
mènerait-elle une vie indigne alors qu'il peut trouver du travail et de
la nourriture dans ou près de son village? 

La société hyper-industrialisée, qui a transformé les villes en moteurs
économiques, a pendant longtemps refusé aux travailleurs le droit de
travailler près de chez eux et d'être bien nourris. Cette pandémie aura
au moins exposé la fragilité de ce modèle qui a abandonné les
travailleurs au premier signe de défaillance, les forçant à marcher des
centaines, voire de milliers de kilomètres pour rentrer chez eux. Ce
système alimentaire industriel a exposé un grand nombre de ses
travailleurs aux risques de contamination. Cela a été le cas dans les
grands abattoirs aux États-Unis, en Allemagne et dans d'autres pays. Les
travailleurs migrants continuent de travailler sans protection adéquate
dans les grandes exploitations agricoles en Europe comme aux États-Unis
et beaucoup ont été contaminés. 

Pourquoi les travailleurs devraient-ils faire confiance à ce système? 

LA SOUVERAINETÉ ALIMENTAIRE EST LA LUEUR QUI MONTRE À NOTRE MONDE LA
SORTIE DU TUNNEL DANS LEQUEL IL SE TROUVE

Ce long et noir tunnel dans lequel se trouve le monde est en train de
s'obscurcir de plus en plus. La majorité des personnes qui vivent dans
des conditions d'inégalités flagrantes sont dans le désarroi et
cherchent des signes d'espérance qui puissent leur garantir équité,
égalité et dignité pour elles-mêmes et les générations futures.

Même dans ces temps difficiles, la solidarité parmi les plus pauvres et
les plus dépossédés nous donne cet espoir. La fraternité et le courage
manifestés par des millions de professionnels de la santé, travailleurs
rendant des services à domicile, de travailleurs agricoles,
électriciens, techniciens, agents de livraison, conducteurs, marins,
peuples indigènes, et autres innombrables travailleurs de première
ligne, nous apprennent que dans les temps de crise existentielle, ce
sont les travailleurs et les paysan⋅ne⋅s ceux et celles qui peuvent
sauver le monde, et ce au risque de leur propre sécurité. Si cette
solidarité persiste, les gouvernements du monde doivent écouter la
classe ouvrière et les paysan;ne.s qui nourrissent le monde. En tant que
mouvement qui représente plus de 200 millions de paysans dans plus de 80
pays, La Via Campesina se fait l'écho des multiples voix qui depuis de
nombreux territoires réclament une fois de plus la souveraineté
alimentaire et la réforme agraire. Nous demandons aussi la mise en œuvre
urgente de la déclaration des Nations unies sur les droits des paysans
et autres personnes travaillant dans les zones rurales. 

LA VIA CAMPESINA, 16 OCTOBRE 2020 

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Links:
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[1] http://www.fao.org/documents/card/en/c/ca9692fr
[2]
https://www.washingtonpost.com/world/2020/09/25/pandemic-pushes-hundreds-millions-people-toward-starvation-poverty/
[3]
https://viacampesina.org/en/peoples-mobilisation-for-a-bindingtreaty-gathers-steam/
[4]
http://www.biodiversidadla.org/Documentos/Publicacion-de-ONU-recomienda-una-transicion-agroecologica
[5]
https://viacampesina.org/en/mst-quilombo-campo-grande-camp-resists-eviction-in-the-midst-of-the-pandemic/
[6]
https://viacampesina.org/fr/indonesie-repression-policiere-contre-les-paysans-qui-protestent-contre-laccaparement-des-terres-par-une-filiale-de-michelin/
[7]
https://viacampesina.org/en/india-krrs-farmers-protest-in-different-districts-across-karnataka-against-amendments-to-land-law/
[8]
https://viacampesina.org/fr/covid19-plusieurs-membres-de-la-via-campesina-alertent-sur-la-vulnerabilite-des-paysan%C2%B7ne%C2%B7s-et-des-travailleurs-agricoles/
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